« La transformation profonde de l’arctique, induite par le climat, peut radicalement modifier le bilan du dioxyde de carbone dans les régions océaniques en aval. Il est fondamental de comprendre pourquoi un changement au niveau de la livraison de d’eau de fonte, de nutriments et de matières organiques dans l’Ouest de l’Atlantique du Nord peuvent exercer une influence sur le flux de carbone tant au niveau régional que mondial. »
De nouvelles données scientifiques révèlent que la capacité des océans à absorber le CO2 et à réguler les températures évolue d’une manière que nous ne comprenons pas. Ces changements cruciaux ne sont pas pris en compte dans les objectifs climatiques : c’est un risque que nous ne pouvons plus prendre. Avec le soutien du Fonds d’excellence en recherche du Canada, l’Université Dalhousie est à la tête d’une approche axée sur les océans pour lutter contre le changement climatique et doter le Canada des connaissances, des innovations et des opportunités nécessaires pour assurer un avenir climatique positif.
En savoir plusL’océanographe de Laval, le Dr. Jean-Éric Tremblay, cherche à comprendre la façon dont les nutriments et la teneur en eau douce des eaux de l’Arctique ,agissent sur les flux de carbone à différentes échelles dans l’océan.
« Les nutriments sont des éléments constitutifs fondamentaux de la vie » de dire le Dr. Tremblay. « le recyclage et la disponibilité des nutriments déterminent la biomasse que peut atteindre les algues marines et les animaux marins et par conséquent leur incidence sur le carbone marin fluctue ».
L’océan est infiniment interconnecté. Les courants dictent la façon dont les nutriments sont redistribués horizontalement entre les zones océaniques. Le contenu des eaux douces de la couche supérieure de l’océan affecte la façon dont les nutriments se déplacent verticalement, à travers les couches stratifiées de l’océan, entre le réservoir profond et la surface, où les algues peuvent les utiliser. Les cycles de l’azote de l’océan comprennent également des processus microbiens qui mènent à des pertes ou des gains nets de nutriments au cours du temps, ce qui a pour effet de moduler leur capacité de capter le dioxyde de carbone.
Avec les étudiants et les boursiers doctoraux, le Dr. Tremblay étudie la dynamique des nutriments de l’océan et leurs changements en analysant des séries temporelles de mesures à partir de navires, à des endroits clés le long des courants marins majeurs dans l’Arctique de l’Ouest et dans le système du Saint-Laurent.
À l’aide de capteurs, des mesures sont recueillies aux fins d’identification de propriétés physiques, de teneurs en nutriments, de processus cycliques de l’azote et aux fins de de caractérisation de matières de particules organiques.
Une préoccupation majeure consiste en ce que les zones océaniques clés telle la formation d’eau profonde dans la mer du Labrador et les secteurs de pêche qui s’étendent tout au long du plateau de l’est de l’Amérique du Nord, se trouvent pris dans un énorme écoulement d’eau provenant de l’Extrême Arctique.
Tout comme les chutes d’eau sur la terre, les cascades d’eau Arctique convergent vers l’est de l’Atlantique du Nord, transportant de ce fait des signes révélateurs d’océan polaire transformés par un réchauffement amplifié et de l’eau douce provenant de glaces pluriannuelles et de glaciers.
Les modifications conséquentes au niveau de la stratification, des voies de circulation, du pH, des charges en nutriments et de la productivité biologique auront nécessairement un impact majeur sur les flux de carbone, au niveau régional en premier et au niveau mondial par la suite, alors que les eaux de fonte et les nutriments se propagent à l’échelle de l’océan.
Le Dr. Tremblay se concentre actuellement sur la baie de Baffin, un lien important pour la redistribution d’eau douce, de nutriments et de matières organiques dissoutes, qui s’évident à travers des points d’accès océaniques. La région abrite également plusieurs communautés inuites qui tirent leurs gagne-pain de l’océan.
Un travail continu avec ces collectivités s’efforce de mieux comprendre les effets cumulatifs des changements climatiques locaux et distants sur la biochimie de l’eau de mer et la façon dont ces effets affectent la quantité et la qualité nutritionnelle des sources alimentaires marines riches en carbone et en lipides.
Le Dr. Tremblay se réjouit à la perspective d’un nouvel observatoire du littoral composé d’une station de recherche et de plateformes autonomes de relevés, utilisant les tous derniers développements en capteurs. Il nous dit qu’ils joueront un rôle central dans la réduction des incertitudes en lien avec les saisons, avec la variété interannuelle et les changements au niveau des propriétés de l’eau et du fonctionnement de l’écosystème, dans les zones clés liant l’Arctique à l’Atlantique Nord.